26 mai 2014

Europe : Caramba ! Encore raté !

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Regardez donc cette belle carte de lendemain d’élection européenne ! En bleu Copé c'est la France de droite, en bleu Marine celle d'extrême droite. Bon, on se rassurera en se disant qu'il y a plus d'un électeur sur deux n'est pas allé voter, mais ne chipotons pas : vote d'adhésion ou non, une élection a horreur du vide des urnes, le FN est donc ce dimanche le premier parti de France. C'est d'une logique aussi cruelle qu'implacable.

Première impression à chaud en découvrant sans surprise les résultats : quel gros succès cette Europe forcée qui voulait éviter la haine entre les peuples et se retrouve à booster les nationalismes un peu partout !  Les gars, va falloir sérieusement repenser le positionnement marketing parce que là, plus personne ne croit au produit et ça va finir en guerre vos conneries.

Bon. Je vous fais le film de la journée :

L'escadrille des experts en espadrilles sur plateaux télés nous répétera que Les Français ont mal voté, sans l'once d'une autocritique après des semaines de tapis rouge offertes au mépris de toute égalité de temps de parole à Le Pen père, fille et nièce. (Bon, à leur décharge, il n'y a quasiment que le FN et quelques petits partis qui ont réellement fait campagne).

Le gouvernement va pouvoir remballer ces annonces de dernière minute totalement contradictoires avec la politique menée depuis des mois (le décret Montebourg de protectionnisme sur les cessions, l’annonce de la baisse de la fiscalité pour un million de ménages modestes…) et continuer à vouloir "aller encore plus vite", en fonçant tête baissée dans le mur de sa croissance inaccessible et de sa dette impossible à rembourser.

Les Eurobabas péroreront en rond que ce serait pire sans l'Europe (va savoir on aurait peut-être le FN à 50%) et que la monnaie unique c'est important tu vois. ("- Oh mais zut, c'est ballot, on n'a pas harmonisé les cadres sociaux et fiscaux dans chacun des pays en amont ! - Mais t'inquiètes, ce que l'on n'a pas réussi à 6 pays, on le réussira à 28 ! - C'est pas comme si l'Europe avait été pensée pour organiser une délocalisation décontractée et une compétition sociale entre pays. Non, non...").

Les philosophes nous diront qu'il faut multiplier par deux les séjours Erasmus et les films de Cédric Klapisch pour amadouer ces jeunes qui votent majoritairement FN. ("Etudier au soleil, c'est cool l'Europe, je vote pour. LOLILOL ! Ah mais zut, j'ai pas le moyen de me payer des études ailleurs déjà que je peux pas me loger dans mon propre pays. Flutalor !").

Les Eurosceptiques vont pavoiser. Et je n'en suis pas. Je ne me félicite pas de se résultat, mais honnêtement je n'en voyais pas d'autre possible vu la politique intérieure et le contexte économique.

Dans le concerto des analyses post-claque, j'espère que l'on n'oubliera pas la date fondatrice de la rancœur. Ce jour du 29 mai 2005 lors d'un référendum populaire (au "oui" programmé par le haut) où les Français disaient clairement "non" à un traité constitutionnel européen signifiant, à tort ou à raison, la perte de leur souveraineté. J'espère que, au milieu des lamentations, l'on n'oubliera pas non plus deux ans après la ratification à l'identique et en catimini de ce traité par nos gouvernants.

Et depuis quoi de neuf ? Des pays qui s’écroulent économiquement les uns après les autres, des profits colossaux pour les banques et les grosses sociétés toujours plus mal redistribués, une explosion de l'optimisation fiscale et des plans sociaux, une Europe brandie comme un totem non négociable derrière lequel se planquent, couards, nos responsables se débarrassant de leur pouvoir pour n'en garder que la représentation... C'est la non-remise en cause même à minima de ce mécanisme pensé exclusivement pour les marchés, et donc contre les peuples (ressenti en tant que tel en tous les cas), qui propulse aujourd'hui un parti anti-UE comme représentant principal de la France au Parlement européen. Euronique non ?

Je n'aurai de cesse de rappeler cette loi basique, simplement humaine : qu'ils soient jeunes ou vieux, stupides ou non, racistes ou pas, on ne traite pas les hommes comme des chiens[1].

A la fin, ils mordent.


[1]  J'ai conscience des limites de l'analogie, les chiens des européens étant probablement mieux traités que les européens eux-mêmes.

19 mai 2014

Comment DSK va revenir en 2017 ?

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- Mais enfin tu n'y penses pas ! DSK il est cuit, ratatiné, mort politiquement !

- Le temps détruit tout écrivait Ovide.

- Non, c'était Gaspar Noé.

- Ou Bob l’éponge je ne sais plus. Enfin peu importe, il avait raison. Oui. DSK va revenir. Tu doutes ? Il ne faut pas. La seule question est : comment va-t-il revenir ? Le "pourquoi" ne se pose même pas : l'accession au pouvoir est inscrite dans le code génétique de tout homme politique, c'est à la fois son oxygène et sa finalité quel scrutins municipaux à trente-quatre habitants). Un destin politique ne s'achève vraiment qu'avec la mort (et encore quand tu vois comment sont réutilisés à toutes les sauces De Gaulle et Mitterrand, ça questionne sérieusement sur l'influence des "forces de l'esprit" dans la nullité du débat politique). 

- Oui mais DSK, il a un problème avec euh... enfin tu sais quoi, ça passera jamais !

- Tss, tss... T'excites pas. Addiction au sexe, abus de pouvoir et infidélité : DSK en 2011, au pire, il était au diapason de l'époque. Et puis après avoir eu un président élu, puis divorcé, puis remarié en Collissimo 24h avec une mannequin chanteuse après une session à Disneyland, et un autre nous jouant un remake au casque de Vacances romaines dans les rues du 8e arrondissement avec sa besace Brioche Dorée en bandoulière, les embardées avec ou sans peignoir de l'"ex-chef du FMI" (et l'on insistera plus précisément sur ce titre) ne jurent pas tant que ça. Au moins avec lui : pas de mauvaises surprises côté cul, on va pouvoir se concentrer sur l'éco. 

- Mais c'est impossible, les gens ne tomberont jamais dans le panneau !

- Oh tu sais neuf millions de personnes ont encore payé pour subir le dernier Dany Boon. Et regarde, tout se met doucement en place : une apparition dans une émission de télévision en prime-time pour rappeler qui c'est le Raoul de l'expertise, la Une de l'Express à trois ans pile de la présidentielle et, en sus, un petit film cradingue à Cannes (bon là, il n'y est pour rien, mais vu que le film est un nanar racoleur qui "fait polémique", tu vas voir qu'au final, au terme de trente-six talk-shows, ça jouera en sa faveur).

- Hé, vous mé reconnaissé ?

- Mais enfin, DSK il est carbonisé !

- Ah bon ? 56% des Français pensent qu'il ferait mieux que François Hollande aujourd'hui. Deuxièmement, il incarne (ne me demande pas pourquoi) la solidité du diagnostic économique. A une époque où l’on reproche au chef de l'Etat de naviguer à la boussole Kinder surprise, crois-moi ça rassure. Pour la droite, il n'est pas trop à gauche. Et pour la gauche, au bout de cinq ans de social-libéralisme et dix millions de chômeurs, il ne paraîtra plus si de droite que ça. Et puis, il a tout enduré. Il a traversé le Styx. Riker's Island, c'est autre chose que d’être coincé dix minutes dans le RER A sans déo après ta journée de turbin. 

Welcome to New-York d'Abel Ferrara relance la théorie du complot :
"- C'est quoi ce bordel ! J'avais demandé une russe !"

- Mais, c'est trop gros ! 

- C'est pour ça que c'est beau. Y'aura quoi exactement en face de DSK ? Le retour de Joe Dalton et la Walkyrie ? Tu le sens le gros débat d'esthètes en 2017 ? La foire du Trône à côté ce sera le café des philosophes. Tu vois d'un seul coup qui parait un poil plus crédible ? En attendant, il va continuer à la jouer profil bas le Domi. Il n'interviendra que parcimonieusement, et que sur les questions éco. Sa com' sera indirecte. Du billard à trois bandes. 

- Oputainwoué ! T'as raison... Je reste sans voix.

- Ça tombe bien, c'est exactement ce qui est recherché : que tu restes scotché devant BFM à regarder, sidéré et captif, le feuilleton de la reconquête du pouvoir par deux "destins brisés", jusqu'au débat de l'entre-deux tours diffusé en 3D animé par Yves Calvi avec en plan de coupes sur la courageuse Anne Sinclair encourageant depuis les tribunes celui a qui l'on a injustement savonné la planche six ans plus tôt. Plus poignant que le final de Rocky II, la revanche.

- Et la politique dans tout ça ?

- La quoi ? [1]


[1] Vois ça avec Politeeks. (Il est à l'origine de ce billet).

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