28 février 2010

Pas loin de la mer

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"Ici, le couple est seul et tranquille. Le locataire pourrait écrire l’inverse sans pouvoir affirmer lequel a provoqué l’autre. A leur âge la solitude n’est pas une fatalité mais une conséquence. Être vieux, c’est ne plus être curieux. Le locataire se sent au fil de sa volonté d’une relative jeunesse et d’une maturité bien entamée. Certes, il prend à la légère ce genre humain mais ne peut rien contre l’accablement que lui provoque les remous de la ruche. En fait, et pour résumer en une supplique son état d’âme actuel, le locataire ne désire qu’une chose : qu’un de ces tsunamis dévaste le monde occidental !

Le cataclysme ne s’abattant jamais, en tout cas jamais de manière à neutraliser l’espoir, cette inépuisable misanthropie l’a conduit à s’isoler dans un monde insonorisé où, au gré de ses humeurs, il vaque à ses solitaires occupations, régnant en maître absolu du frigidaire à l’ordinateur. La solitude ne lui pèse pas. Mieux, il n’a eu de cesse de la parfaire. Trois années de vagues fracassées à portée de regard ont renforcé son caractère retiré au point de se demander comment, désormais, il pourrait l’améliorer. Exilé volontaire en terre protestante, à la pointe de sa presqu’île décentralisée, le locataire ne peut physiquement plus être autrement que seul. Et des fois aussi, avec l’aimée. Celle-ci dort depuis un moment alors qu’au terme d’un après-midi passé sur la route depuis La Capitale, ils traversent, abrités dans leur tank, les faubourgs aérés de La Rochelle."

Avatar, juillet 2005, p.51

24 février 2010

La belle et le costard

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Dernière clope en terrasse, le commis empile les chaises sur les tables, le troquet de banlieue va bientôt fermer.

Au moment de rentrer dans la salle pour régler son ardoise de la soirée, Romain remarque à une table le manège d’un gros à costard en train de sermonner une belle étudiante moulée dans un jean à liseré diamanté estimé à 150 euros. Un bichon lilliputien ronfle aux pieds de la sylphide soignée. Avec son enthousiasme communicatif sur col amidonné, on dirait le bedonnant libidineux à costard bien taillé et chemise à rayures sorti d’un lip dub sous LSD de l'UMP. Les deux chacun à leur manière, elle dans la distinction et la retenue, lui dans l’étalage du fric, sont "hors-série" pour le rade interlope plus habitué aux canons de l'ivrognerie populaire.

Ce n’est pas ici qu’ils seront surpris par leurs connaissances respectives. Lui, roucoule du billet en lui prodiguant des conseils au sujet de ses prochains examens à Science-Po. Elle, blanche, s’agrippe à sa coupe de champagne dont elle ne boit pas une goutte, feignant l’attirance, mais endurant le dégoût.

Romain a beau être entre la pomme et la poire (et sur conseils avisés du taulier prêt à tester l’Armagnac extrême cuvée) le rapport de force lui apparaît limpide comme un constat de Parisot sur la question des retraites : Le friqué entretient l’étudiante en échange d’un tirage occasionnel, quand et comme il le peut, dans la garçonnière qu'il lui subventionne à une encablure de berline d'ici.

Le goret à gourmette lâche sa coupe visant la croupe et pose la main sur celle de sa douce. Frissons. Torts partagés. Y aurait-il des fumiers sans soumises ?

LE TAULIER servant un godet à Romain
"- Bois une prune et réfléchis à la question !"

Romain s'enfile le 40 degrés épiant cet énième cas de prostitution générationnelle. Quelques quinquagénaires en fin de règne ont le fric, les jeunes leur mangent dans la main en rêvant de festin. Les bourreaux sont les mêmes que chez Balzac, les Rastignac contemporains : Aspirants à la marque, assoiffés de superficiel, camés au standing, formés à la bassesse. De l'Heil-phone au sac Lancel, la pauvre princesse du bar a tout l'attirail des apparences de la richesse made in Paris mais fabriquée en Chine .

L'échéance du slip se précise. La belle est blême. Le bichon trépigne, le friqué aux yeux de porc aussi : Belle ou bichon, il est dans un tel état d'excitation qu'il culbuterait n’importe quoi doggy style sur le bar du bistrot. Romain capture et décode le regard de l'effrayée : ALERTE ENLÈVEMENT.

Ultime Armagnac. Romain aurait bien sorti la princesse de là mais n'a pas le budget pour relancer la partie. Tristes mais fières : ces belles consomment beaucoup. Pour cause de frais bancaire, ce mois-ci, lui est encore à découvert. Sa pitié ne peut rien contre les liasses du replet recommandant du Laurent Perrier au taulier qui, à 150 euros la boutanche, peut bien rester ouvert dix minutes supplémentaires.

La belle cultive l’espoir dans le champagne : Elle spécule sur l'ivresse du répugnant pour bénéficier d’un plan sauvetage suite à la chute des bourses.

Mauvais choix. Romain rodé à la rudesse des rades, tente la transmission de pensée : "- Fais comme moi ma belle : Bière, Cahors, Armagnac, Manzana, Prune. C’est radical pour dissoudre les petites comme les grosses emmerdes !"

Encore quelques longues minutes de ricanements du genre "- y a beaucoup trop d'auvergnats" et hochements de tête féminins façon "- tu es drôle mon amour" et elle finit par céder à la loi de celui qui distribue la monnaie. Elle boit et boit encore. Le bichon se recouche, la nuit sera longue. Certaines appellent ça de l'indépendance.

De la mise aux enchères de sa virginité sur internet à l’acceptation de conditions de travail ultra dégradées juste pour marquer une ligne dans le cv et cette impression de malaise qui n’en finit jamais : 18, 22, 25, 30 ans, un début de vie à genoux pour une poignée de cacahuètes, à servir la soupe et livrer son cul à la génération du dessus.

Que ferons tous ces jeunes lorsque leurs vieilles tirelires auront canné et qu'eux-mêmes seront moins frais ?

Le gros laisse trainer sa paluche poilue sur le derrière fuselé de la petite. Romain entends des mots.

LE FRIQUE
"- C'est important les relations."

Le couple arrangé abandonne sa bouteille et s’en va au moment où le patron sponsorise un dernier rhum à Romain. La belle baisse les yeux devant le garçon, le bichon se laisse trainer sur le carrelage graisseux, le goret salue l'assemblée des avinés fauchés. La porte fait gling-glong. Ils s'en vont bras dessus main dedans sur le boulevard des clodos.

LE TAULIER nettoie les verres
" - Si c'est pas malheureux. Le sarkozisme nous poursuit jusqu'ici."

Mais enfin, la soirée n'est pas perdue pour tout le monde.

Romain, le taulier et les autres liquident, satisfaits et jusqu'à la dernière bulle, la fin de bouteille de l'homme aux billets.

23 février 2010

Les ratés du Politotron

par

Agence France Paresse / 22 février 2012


Politique et nouvelles technologies – La mise en service du Politotron est repoussée à une date ultérieure pour raisons techniques (source Elysée).

C'était à titre expérimental qu’était testé aujourd'hui le Politotron.

Le lancement d'un scanner intégral pour candidat politique était initialement prévu pour les élections présidentielles de mai prochain.

Selon les initiateurs de la loi Loppsi II : "Le Politotron s'inscrit dans un esprit de transparence, dans le cadre du renforcement des mesures de sécurité démocratique après les attentats réussis de mai 2002 et mai 2007, sans parler des suites du référendum de 2005."

Rappel – C’est Francis Delattre, maire de Franconville qui, en février 2010 dans le cadre de la procédure d'urgence « UMP : perdre avec dignité », avait initié ce mouvement de salut public lors de l'affaire Ali Soumaré.

Le Politotron provoquait aussitôt le trouble dans la classe politique.

Basé sur le volontariat, il permettait à tout candidat au scrutin, en mettant de côté son programme, d'être vu dans son plus simple appareil judiciaire afin que soient identifiés ses erreurs de jeunesse, ses cumuls de mandats, ses rémunérations, les condamnations cachées et les peines purgées, ses avantages en nature, ses doubles-vies, récidives, les amants et maitresses dans le placard et mêmes les calomnies. (L'amendement concernant les promesses non tenues n'a en revanche pas été voté.)

Tout ressort en un simple coup d’œil auprès d'un opérateur journalistique du même sexe isolé dans une autre cabine.

Malheureusement, le prototype aurait explosé ce matin dans la cour de l'Élysée.

Et une nouvelle polémique d'enfler aussitôt, l’opposition accusant la majorité d’avoir volontairement saboté l’appareil en le soumettant au scan intensif de Patrick Balkany.

"- Ce n'est pas grave !" Assure Pascal Nègre, en charge du pôle délinquo-technologique au Ministère de l'intérieur : " - La version 2.0 à l'étude avec détecteur de mensonge incorporé, sera testée dès juin 2012, en borne automatisée, dans tous les Pôle Emploi du territoire. Personne ne peut arrêter le progrès et la soif de vérité !"

21 février 2010

[video] Partage du travail, création monétaire, revenu de vie : vers le big-bang économique

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En ces temps de pessimisme général, voici deux visions filmées de pistes économiques pour une sortie de crise "vers le haut" émanant de deux personnages croisés récemment...

Opposées, complémentaires, radicales, utopiques ? Elles ont ce point commun de sortir du prisme des analyses classiques.


1 / Pierre Larrouturou et la réduction du temps de travail.
Pour le définir, citons l'économiste aux killer-graphiques lors de la conférence sur la crise à laquelle j'assistais le 13 février :

"La France est encore le seul pays où un a un petit bonhomme qui, en période de chômage, nous dit qu'il faut travailler plus."

Il cite l'exemple du Kurzarbeit allemand : En 2009 de l'autre côté du Rhin, la récession de -5% a été deux fois plus importante qu'en France, et pourtant il n'y a "que" 220.000 chômeurs de plus alors que chez nous sur la même période de 18 mois nous en sommes à +800.000 chômeurs.

"Si nous avions fait la même chose, nous aurions 600.000 chômeurs de moins. Mais Madame Merkel, au lieu de citer Léon Blum et Guy Moquet, elle a mis 4 milliards sur la table !"

Bon... la réduction du temps de travail n'est pas l'analyse tendance du moment. N'empêche qu'elle inclut un paramètre systématiquement écarté des réflexions des économistes ayant pignon sur cerveau depuis 30 ans, une révolution technologique sous estimée par les gouvernements successifs et grâce à laquelle on pourrait, en théorie, enfin accéder à l'amélioration des conditions de travail et à la diminution de sa durée : La révolution de la productivité.

Bref, on a besoin de moins de monde pour produire plus, ce qui est plutôt cool.

Que les pourfendeurs acharnés des 35 heures sachent que ce partage s'opère déjà .... mais d'une manière déséquilibrée : A travers la précarité. Il y a aujourd'hui ceux qui ont les bons boulots (travaillant en moyenne 39 h), une bonne partie de chômeurs et ceux au milieu avec des contrats à temps partiel et de plus en plus rognés. Problème : Le politique ayant rendu les clés de l'économie à la finance mondialisée, continue à diriger en local avec 30 ans de retard pour les premiers (en voie d'extinction) tout en faisant rêver les autres à des meilleurs lendemains de sempiternelle croissance.

Celle-ci est compensée par la dette (des particuliers ou des états) jusqu'à l'écroulement de tous. La dette a cet avantage de rendre euphorique les marchés et les banques selon le principe désormais mondialement connu du : Youpi, Krach, Boum (dans ta gueule) !

Le retour de la croissance n'est donc pas l'unique parade pour contrer le chômage. Larrouturou propose de passer à la semaine de quatre jours.

Son interview en collaboration avec Reversus > 6 mns :



Pearltrees de Reversus : Pierre Larrouturou et la diminution du temps de travail

P.Larrouturou et la réduction du temps de travail

Pour faire tourner la machine, faut du pognon, donc faut le partager : C'est sur ce constat tout simple qu'arrive le second théoricien....


2 / Stéphane Laborde : la création monétaire et le revenu de vie.

«- A force de concentrer les richesses au sommet et d’appauvrir la base, tout va finir par s’écrouler et ça va pas prendre dix ans. »

Stéphane Laborde, ingénieur de formation, est entrepreneur, un odieux libéral en quelque sorte (d'ailleurs régulièrement confronté à Gérard Filoche dans de tonitruants twit-clash) mais il veut remettre l'homme au centre de l'économie (et pas seulement à coups de fouet).

« - Ils te vendent du libéralisme mais ils n’ont pas un échantillon sur eux. On ne peut pas dire aux chinois, on va jouer dans le même marché avec des différences de salaire pareilles. La vraie concurrence doit être libre et non faussée donc l’esclavagisme doit être interdit. »

Laborde est un think tank à lui tout seul.

« - Je ne sais pas ceux qu'ils foutent là-haut mais moi j’ai bossé […] Il faut changer de paradigme »

Pour le monomaniaque de la monnaie : tout est argent. Qui le crée qui le perçoit.

« - La masse monétaire est la question fondamentale dont découlent toutes les autres et personne n’en parle !"

Son crédo : "les banques ne peuvent pas vivre sans hommes, les hommes eux peuvent vivre sans banques." Son antienne : le revenu de vie ou dividende universel. Indexé sur la création monétaire dans la zone euro, le dividende universel serait mensuellement redistribué à part égale entre chaque citoyen de sa naissance à sa mort, qu’il travaille ou non.

« - Parce que vivre c’est une activité bordel ! »

Larrouturou, Laborde et moi-même (et même Filoche tiens) nous retrouvons probablement sur ce constat : Du fait de ce rapport faussé où le travailleur n'est perçu qu'en tant que "charge", il devient un troufion sur pressurisé jusqu'à épuisement par un management lui-même oppressé et hautement jetable. Ceux qui ne travaillent pas, vus comme du "passif", sont plus ou moins discrètement chassés des statistiques et du monde des vivants.

Pour comprendre le raisonnement "philosophiéconomique" ayant amené un libéral à proposer du pognon pour tous, il est nécessaire de visionner cette première partie, instructive, sur la création monétaire...

Part.1 : La création monétaire



et donc...

Part 2 : le revenu de vie (ou l'argent conçu comme un flux commun dont personne n'est jamais déconnecté) > 6 mns.


Pour représenter la mutation du monde en cours, Laborde file la métaphore spatiotemporelle.

L'économie actuelle serait "comme un trou noir" avec deux espaces temps : Le temps relatif de ceux qui sont très prés (riches, banques, spéculateurs et endettés…) et celui, plus rapide, de ceux qui sont éloignés du trou noir et de son pouvoir d'attraction (marginaux, hors système, économie de l'échange, non-endettés…). Ces deux temps sont deux économies, deux systèmes de valeur opposés. Le premier monde disparaît, attiré par le trou noir de la croissance. Le second se fortifiera en innovant et en recyclant la matière morte. La nouvelle économie est invisible pour l’ancienne économie qui, le nez dans son ancienne grille de lecture, n'arrive même pas à la concevoir.

Pearltrees d'Olivier Auber sur le revenu de vie
Revenu de vie

Malgré les interrogations qu'en joyeux pessimiste j'ai encore sur les effets secondaires indésirables que pourraient provoquer l'application unilatérale de l'une ou de l'autre des propositions, elles ont ce point commun, sans sombrer dans le délire, de dépasser l'incantatoire et illusoire "moralisation du capitalisme" et son pendant, la diabolisation, et de viser la redistribution et le partage.

- L'une sous l'angle du travail et d'une remise à plat des gains de productivité, couplée à une véritable fléxicurité.

- L'autre sous celui du partage de la masse monétaire, favorisant et tablant sur l'initiative personnelle. (Colossal Achtung : S'assurer que ce revenu de vie ne se substitue pas au reste, couverture santé, indemnisation chômage... )

Il y en a d'autres (gratuité des échanges, autogestion..) qui imposent souvent de dépasser "le vortex de la croissance infinie" et de regarder plus loin que les évidences assénées par les mêmes qui nous ensuquent dans leur logique pour nous maintenir, à leur seul bénéfice, dans le fatalisme.

* * *

- Site de Pierre Larrouturou. Ancien délégué national Europe du PS, il est tête de liste Europe Ecologie dans les Hauts-de-seine.

- Site de Stéphane Laborde. Sans étiquette, il votera pour le candidat qui se prononcera en faveur d'un revenu de vie.

Illustration : "les temps modernes" de Charles Chaplin 1936, MK2 diffusion, disponible ici.

18 février 2010

Pas de retraite dans ta tête

par

Banale entourloupe en une des quotidiens et des journaux télévisés de mardi :

« Réforme des retraites, cette fois c’est parti (mais en douceur). »

Le monarque, magnanime, ne "passera pas en force" et reporte à la rentrée un débat déjà tranché sur "l'épineuse question" des retraites. A 39% de popularité et quatre semaines de régionales, "l'urgence" peut attendre six mois.

Pour l'occasion, lundi soir sur les plateaux des JT fut encore joué le concert télévisé du "bon sens" réduisant à une seule les modalités de l'inévitable sauvetage : L'allongement de la durée de cotisation.

- Oh tu nous saoules avec tes histoires de retraite ! Nous on y aura pas de droit de toutes les façons ! Me lance Yolanda sur un smash hargneux à la Monica Seles.

Dans le salon bonbonnière, nous attendons notre copain commun, Thibaut dit Cochonou, besognant à 2 heures de RER de là. Yolanda, plus préoccupée par sa dépense de calories que par l'accumulation de ses points retraite, dispute un 8e de finale à Flushing Meadows sur Wii-Fit tandis que sur l'autre écran plasma[1], je me concentre sur les tableaux à gros chiffres du présentateur de JT synthétisant l'apocalypse des retraites. Le gendre parfait m'explique comment et pourquoi il est bon de se faire piétiner par le patronat au prétexte que d'autres pays en font leur priorité.

"- Tu crois que les gens vont accepter sans rien faire ?" Volleye l'effarée manquant de balancer le joystick dans l'écran pour le deuxième fois de l'année.

"- Son problème à lui c'est la pyramide des âges. Pas celle de 2050 mais celle d'aujourd'hui. "

"- Et quelle est-elle ?" Ne me demande pas Yolanda rapport qu'elle a la capacité de concentration du pétoncle et qu'au milieu de ma réponse elle est partie dans le boudoir, des cacahuètes plein la gueule, se commander une pizza sur le net.

Les catégories (telles que mises en concurrence par le marché) les voici quand même :

- Les plus de 60 ans déjà à la retraite votant à plus de 60% pour qui on sait et disposant jusqu'à présent d'un pouvoir d'achat globalement plus élevé que les autres (cadençant ainsi la société au gré de leur consommation, de leurs demandes de services, de leurs névroses ou de leurs placements immobiliers.)
Mais, double problème monarchique, la partie basse d'entre eux vit de plus en plus mal (on la travaille à l'idée que la retraite est le moment idéal pour se remettre à bosser) et une "réforme des retraites" peut effrayer ceux qui n'ont pourtant rien à en craindre (comme souvent).

- Les 40 /60 ans : catégorie en expansion des sous-seniors.
Le sous-senior cumule toutes les crasses. Considéré comme un senior, il ne bénéficie pas des avantages. Trop qualifié ou trop expérimenté, efficace et disposant d'un potentiel de formation énorme, il est jugé trop coûteux (le patronat ayant ses logiques court-termistes que même la productivité pure ignore). Avec parfois un quart de siècle de labeur au compteur, de plus en plus souvent mis au rebut, notre monarque prépare à ce paria un futur proche plutôt merdeux : Travailler plus longtemps ou rester encore quelques années au pôle emploi avant de pouvoir prétendre à la retraite et je ne te parle pas du mec qui a commencé à 16 ans, qui a assez cotisé et à qui on annonce qu'on lui recule tout le bazar de deux ans. Peu probable qu'il penche à droite en 2012 celui-la.

- Les 30 / 45 ans : Le gros des cotisants actuels, dont toi Yolanda. La tranche des 30 / 45 est influençable selon son positionnement social, son bagage universitaire et son type de métier. Constatons que les diplômés confiants dans leur parcours qui ont commencé à travailler tardivement, disposant de bons salaires , de métiers passionnants et se réjouissant de bosser au-delà de 60 ans, ont plus d'influence dans le débat que le manut d'Ikea.

- Les jeunes 18-35 (avec toutes les guillemets possibles cette période de relative "dépendance parentale" dépassant parfois de beaucoup l'âge indiqué)Moins nombreux, acquis au consumérisme et considérant que "la politique c'est des pourris et que voter ça sert rien", ils pésent peu dans un débat dont ils seront les principales victimes.

A ce stade Yolanda, bien que tu sois captivée par le sujet suivant du JT, un concours de bonhomme de neige à Tahiti, deux interrogations devraient te tarauder :

1 / Pourquoi ton homme revient de plus en plus tard le soir ?

2 / Quels sont les vrais objectifs de ton gouvernement ?

Pour la deuxième, j'ai quelques idées :

- Bloquer le niveau des cotisations : Elles coutent trop cher aux patrons qui sont plus assez compétitifs pour te licencier on t'a dit.

- Développer les retraites complémentaires histoire d'enrichir un peu plus assureurs et banquiers en te persuadant préalablement que l'ancien système est impossible à tenir. Alors que si. Actuellement le déficit des caisses de retraites est de 10 milliards[2] ce qui, tu en conviendras, au regard des 15 milliards d'exonération de cotisations patronales sur les heures supplémentaires entre autres poches à revenus potentiels, n'est pas la mer à boire.

Le "problème des retraites" est d'abord idéologique. Augmente progressivement les cotisations sur 15 ans et développe un système de taxation sur les flux financiers, ça t'atténuera un max "l'apocalypse" des prestations (et ramène une bière sur le chemin).

- Ne pas supprimer la retraite par répartition. Et oui, ça te surprend Yolanda mais là je veux bien croire mon gentil gouvernement. Il ne détruit rien de face mais, comme d'autres sanctuaires mis en kit (cf secteur public) : il crée les conditions pour en faire un système bancal et compliqué où les mieux placés se tricoteront une retraite privative tandis que ceux du milieu engraisseront les premiers, tout en méprisant ceux d'en dessous devant se contenter d'un "minimum vieillesse 2.0" qui les maintiendra dans une précarité ayant le double avantage :

1 / de ne pas coûter grand chose à l'état.

2 / de servir, à l'instar du SDF d'aujourd'hui, d'argument publicitaire à bon marché pour la retraite privatisée.
L'état se soucie du montant des retraites des jeunes générations ? Trop gentil. Qu'il crée les conditions d'un emploi mieux rémunéré et plus largement partagé entre les générations au lieu de s'en tenir à cette gestion darwiniste de toutes les situations : Piétiner ceux qui n'ont pas pour renforcer ceux qui ont.

Le monarque fait de la réforme des retraites le combat majeur de son quinquennat. Sa réélection se joue en grande partie sur cette bataille qu'il entame contre son peuple. Pour réussir, il a un besoin crucial de ta déprime et de ta démotivation. Yolanda, s'il te plait pas, ne capitule pas avant le premier assaut.

Je ne sais pas à quel moment de mon exposé son regard a décroché du JT. Toujours est-il qu'elle me fixe et que je crois déceler un départ d'incandescence dans son œil gauche :
- "T'as vu c'est dingue, on peut envoyer des prouts par SMS !"


Allez hop, vidéo... (avec la participation d'Edelihan).


[1] Cochonou et Yolanda ont deux plasmas, un pour le plaisir l'autre pour la détente.


[2] 250 milliards distribués pour 240 récoltés.

15 février 2010

Stiglitz, la crise et les bulles

par
Le controversé Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie en 2001, ancien conseiller de Bill Clinton (1995-1997) était à Paris pour la promo de son nouveau livre : « le triomphe de la cupidité ».

Il participait samedi dernier à une conférence en deux parties sur la crise « comment éviter la rechute ? » et « comment faire naître une nouvelle société ? ». Deux parties n'en faisant par défaut qu'une seule, tous les intervenants [1] s'accordant sur le fait que si nous poursuivons le modèle de l’ancienne société, inévitablement, celle-ci rechutera.

C'est
même bien parti pour. Stiglitz redoute une pénible sortie de crise via une croissance molle à la japonaise, avec chômage massif, pour des années. Et encore, c'est la version optimiste.

Voici un extrait de son intervention d'une heure au sujet d'un thème qui a longtemps occupé les billets de ce blog : La bulle immobilière ! [2]Ou comment, via une cascade de bulles, faire la jonction entre le passé et ce qui nous attend : La BCE appelant aujourd'hui les états à réduire leur dette![3] (Dans la foulée les mêmes ayant contribué à la dernière catastrophe misent sur les défauts de paiement d'une zone euro envisagée comme un champ de bataille spéculatif.)



« Depuis deux ans, nous tournons en rond. Nous en restons à la surface des choses, aux bonus, aux traders."

"On a compensé par des emprunts ce qui ne va pas aux salaires. Ce qui a permis de maintenir la croissance et de rendre euphorique les marchés. »

Le serpent se mord la queue : « L'Angleterre serait en récession depuis 2002 si les anglais ne s’étaient pas endettés massivement pour les dépenses courantes. »

Après avoir tiré sur les marchés financiers, dans la deuxième partie, Stiglitz évoque d’autres responsabilités plus individuelles quant aux modes de vie et de consommation, notamment aux Etats-Unis où la part de temps dégagée chez les actifs grâce à qu’il appelle le dividende technologique[4] était jusqu’à présent principalement constituée d'un… surplus de travail[5] La réduction du peu de temps libre était donc consacrée à une acquisition frénétique de biens de consommation.

Un penchant vers lequel l’Europe, sous les conseils de monarques américanisés, voulait – et veut encore – envoyer un peuple envouté par les sirènes publicitaires.

« Bizarrement, il semble y avoir cet espoir que nous retournerions au monde d’avant 2007 mais ce ne sera pas le cas. Et même si nous le pouvions, nous ne devrions pas. »

Après cette crise qu'il qualifie de « Near death experience » il en appelle à des sursauts nationaux[6] de type New Deal avec réinvestissement massif dans la santé, l’éducation[7] et les biens communs - et profitables à long terme à la réduction de cette fameuse dette des états -. Il déplore "la stupidité" des dirigeants européens en la matière.

Bref, c'est précisément au moment où il faudrait dépenser et redonner l"espoir que les états vont réduire les deux...


Merci à Marc Vasseur.
* * *

[1] Edgar Morin sous l'angle philosophique et humaniste. Pierre Larrouturou et ses graphiques de choc sous l'angle de la réduction et de la répartition du temps de travail ou Marc Dufumier, agronome, sous l'angle des dérèglements agricoles entre le nord et le sud. Les interviews arriveront prochainement.

[2] Pas terminée. Un emprunteur immobilier sur quatre aux États-Unis doit désormais rembourser plus que la valeur de sa maison.


[3] Soyons persuadés que le haro sur ces pays baptisés « cochons » n’est que la bande annonce du film "violente restriction budgétaire" qui attend d’autres pays de la zone se pensant plus « nobles ».

[4] Stiglitz reprend la théorie de Keynes sur le fait que depuis la nuit des temps l'homme consacrait ses journées à la survie, et que le progrès venant il ne consacrait désormais concrètement plus qu'une heure par semaine à cette survie.


[5] Le temps de travail a augmenté depuis un demi-siècle aux Etats-Unis.


[6] Les solutions apportées par l'économiste se cantonnent aux grandes lignes :
- Renforcement de l’action collective.
- Renforcement de la justice sociale.
- Renforcement de l’état dans son rôle créatif.
- Réduction du rôle des marchés financiers.
- Prise de conscience des marchés, et du peuple, que les innovations ont souvent été initiées par les États et non le secteur privé.

[7] Dans ces propositions finales, il appuie par ailleurs sur la nécessité d’un retour à une bonne éducation, expliquant par exemple que dans les cas des crédits « subprimes » les banques ciblaient spécifiquement les gens les moins éduqués.

10 février 2010

Apocalypse news

par

Mardi dernier c'était Thema sur Arte. « Main basse sur l’info » que ça s'appelait.

Au programme : deux docs bidons et un débat à la gomme sur internet où, comme d'habitude, pas un seul spécialiste du sujet ne fut convié.

Je ne traiterai pas ici du premier reportage (déja culte) sur les complotistes dont le titre « Les effroyables imposteurs » explicitait les intentions du réalisateur. Je n’en ai vu que la 2eme moitié : Cet exercice de style à la finesse du bulldozer consistant à reproduire à l’identique mais en politiquement peinard, les travers d'approximation et d'enfermement dénoncés, réussirait l'exploit de convertir aux théories du complot Jacques Attali et Saint-Thomas.[1]

Non, j’attendais le programme sérieux de la soirée avec des journalistes expérimentés et intransigeants, formés à l’école de la rigueur, imperméables aux pressions et aux législatures successives.

« 8 journalistes en colère » présente en 24 minutes une sélection de notables du journalisme se livrant à l'analyse des dérives de leur métier pour tenter d'expliquer la perte d'audience et de crédibilité dont ils sont les victimes.

LA FORME :
Ambiance musicale dynamique et un poil stressante (c'est l'avenir de la presse qui est en jeu !), photographie ténébreuse et filtrée, plans fixes HD sur les représentants de la presse : Le gentil spectateur est mis en condition. Ici mon gars, c’est pas du .flv 420X340 à 14 images / seconde filmé au Nokia 3G par on ne sait pas qui.

- La vache : c'est la nouvelle saison des "Experts " ?
- Nan, c'est un ami de la femme du président qui va dénoncer les abus de la désinformation.



FAITES ENTRER LES VICTIMES :
Le commentaire emphatique présente « la star de l’information [...] aux 5 Millions de spectateurs ». David Pujadas ouvre le bal des maudits et nous livre face caméra son édito d'intro sur « la crise des médias » poignant comme une campagne d'Amnesty international.

DAVID P., démonstrateur en information battu. (Paris)
« - [...] Je crois que le problème n’est pas à côté de nous mais en nous. [...] le journaliste n’est soumis à personne sauf à lui-même [...] il souffre d’abord de conformisme et de mimétisme [...]. On a le sentiment d’entendre un bruit de fond médiatique avec non seulement les mêmes sujets au même moment mais avec les mêmes mots et surtout, surtout, le même regard, la même sensibilité. [...] C’est ce que l’on pourrait nommer le journalisme des bons sentiments [...] émouvoir, toucher le cœur mettre en scène la complainte ça fait de l’audience mais il y a plus que ça. Le journalisme des bons sentiments c’est aussi une bien-pensance, c’est l’idée que par définition le faible a toujours raison contre le fort [...] En fait c’est une dérive mal digérée de la défense de la veuve et et de l’orphelin : cette posture qui valorise le journaliste et qui a l’apparence du courage et de la révolte.

Plan serré pour mieux sentir l'émotion du mec qui n'a pas encore fait 327 heures de direct sur les cadavres encore chauds d'Haïti.

DAVID PUJADAS
"- Alors que faire ? Sans doute revenir aux fondamentaux du journalisme, s’écouter soi même et laisser parler sa propre curiosité, ne pas se glisser dans un moule."

Soyez gentils les gens, aidez cet homme à être moins intolérant avec lui-même. Regardez son JT.

VOIX OFF MODE CHAUSSE-PIED
« - Ne pas se glisser dans un moule? Facile à dire. Mais comment faire, quand on doit comme David Pujadas fabriquer un journal tous les jours dans l’urgence face à la concurrence acharnée des autres médias ?"

Le saviez-vous ?
La prolifération de l'information sur le réseau est mauvaise pour le citoyen.

La prolifération de télévisions pour préparer son information est bonne pour le journaliste.

Et l'animateur de déplorer un "vertige" tout en culpabilisant son absence de "hauteur" dans l'histoire des défenestrations de France Telecom. Il en a trop fait, ça se trouve le taux de suicide était tout à fait normal. Il aurait du vérifier.

"- Peut-être que l’on s'est laissés rouler par une énorme vague, celle de ce bruit de fond médiatique ?"

Bah, dis donc David t'en as des malheurs. Ils sont méchants ces salariés sur-stressés et traités comme du bétail qui se suicident pas assez, rien que pour pourrir ta crédibilité.


VOIX OFF MODE COURBETTE
"- Autre journalisme, autre trajectoire celle de Philippe Val. Ex directeur de Charlie Hebdo, patron de France Inter. En publiant les caricatures de Mahomet dans le journal satirique, il a gagné le droit de se méfier de tous les conformismes."


PHILIPPE VAL
" - Le pire ennemi du journalisme c’est sa conviction d’être au service du bien et de la pureté. Le journalisme n’est pas une religion...
[c'est tout ? je pensais que tu serais plus solennel]
...La tentation est grande de faire primer la thèse sur le fait. "
[spéciale dédicace au réalisateur du doc précédent]
"... Le discours démagogique des uns marginalise le travail sérieux des autres. Ce n’est pas parce qu’il exprime son opinion qu’un journaliste est libre et indépendant..."
[On est pas un ancien de Charlie-Hebdo pour rien : gros LOL garanti !]

Pour ce patron de radio, le journalisme n'est pas :
a / une religion.
b / une secte.
c / une représentation exacerbée de la lutte des classes avec sa baronnie et son sous-prolétariat.


Respiration visuelle :
On retrouve un Val proche et impliqué en salle de rédac'. Si, si ça se voit : Il fait oui-oui et non-non de la tête et il y a un téléphone pas loin.


VOIX OFF MODE PREMACHAGE DE L'IDÉE QUI VIENT
"- Illustration avec cette attitude très répandue qui consiste à faire passer dans bien des rédactions le point de vue avant les faits."

Il a du sentir qu'on parlait de lui : Voilà Jean-Pierre Elkabbach.

- Yo.

VOIX OFF
MODE TAPIS ROUGE
« ....ce grand professionnel est aussi depuis plus de quarante ans l’un des journalistes les plus controversés de l’hexagone. [...] Il n’est pas du genre à se taire »


Elkabbach termine, comme les autres, son décompte précédant le laïus (Ça et le maquillage filmé, autre truc du montage, ça impressionne les gueux) :


JEAN-PIERRE ELKABBACH
« - Je me garderai bien de jouer les imprécateurs, les procureurs ou les donneurs de leçon. [...] Quand je m’interroge sur les raisons de la désaffection des lecteurs, de l’érosion actuelle de la vente et des audiences, de la crédibilité qui fluctue de la presse et bien j’ai envie de dire : Assez ! Assez de considérer les affaires du monde comme une bataille entre le bien et le mal. Assez de nous copier, de nous répéter les uns et les autres, assez d’agir en meute."

Fier et digne, l'ancien patron de France Télévision à l'origine du concept d'animateur-producteur sur fonds publics, qui nous avait annoncé la mort de Pascal Sevran six mois avant son décès, monte en intensité, des trémolos dans la voix :


JEAN-PIERRE ELKABBACH
"- Assez de réclamer plus indépendance et d’aller courir après les subventions de l’état. Je crois que c’est la rigueur, la curiosité la qualité qui assurent l’indépendance de la presse. Assez. Assez de nous complaire dans la peopolisation, je n'en peux plus, dans l’émotion, dans l’irrationnel et le voyeurisme. Et puis assez d’encenser un jour, de vilipender le lendemain et de porter aux nus, les mêmes, les mêmes, le surlendemain.
[faites comme lui, flattez toujours les mêmes.]
Assez de faire croire que le citoyen journaliste va se substituer un jouer au journaliste citoyen. "

* * *

[communiqué de la direction]
Ce documentaire vient de déraper plus tôt que prévu dans sa 2eme partie,
nom de code :
"A défaut d'y comprendre quelque chose, pétons la gueule au net."

* * *

JEAN-PIERRE ELKABBACH

" - Certes, la révolution d’internet favorise, accélère et transforme chaque internaute en créateur d’événements...
[note bien pour ton lexique d'avaleur d'actu : L'internaute crée de l'évènement, le journaliste fait de l'info.]
...Mais toutes les expériences citoyennes ont besoin de vrais journalistes pour sélectionner, vérifier et écrire. Alors chacun à sa place."
[... et personne à la sienne]

QCM : Que désigne par ce geste cet éditorialiste multi-support ?
a / le crédit qui lui reste auprès des politiques ?
b / le crédit qui lui reste dans l'opinion ?
c / le crédit qui lui reste dans sa propre rédaction ?

Résumons la position d'Elkabbach sur le rapport net / info :
Parce qu'on a pas d'équipe sur place, reprendre au JT une émeute filmée chez lui par un iranien ou un chinois qu'il balance sur le net au risque de sa vie en déjouant la censure : C'est un formidable outil.

Qu'une équipe de télé ayant filmée un flag de racisme pépère d'un ministre soit contrainte de diffuser sur internet la séquence en question parce que sa propre direction l'autocensure : C'est un danger pour l'information.

CQFD : C'est en Chine et en Iran qu'Internet c'est bien.
(ça tombe tien avec Loppsi 2, on y va direct.)

Illustration visuelle :
Elkabbach en plein close combat radiophonique, sans protection et à moins de dix mètres d'un socialiste enragé et sans muselière.[2]


VOIX OFF MODE FESTIVAL DE CANNES
"- Pujadas, Val, Elkabbach.. une sacrée brochette de professionnel rassemblés ici pour dire à peu près la même chose : C’est en nous journalistes que réside la meilleure réponse à la crise des médias."

En décodé, version rente : Nous sommes le problème mais comme nous percevons le gros salaire, nous sommes également la solution.

A ce stade, un doute m'assaille. N'assisterais-je pas à une énorme parodie de documentaire à l'anglaise ? Non, non c'est bien du premier degré à la française : La tragi-comédie apocalyptique des suffisants qui expliqueront jusqu'au bout pourquoi eux ont tout compris et les autres rien du tout.


VOIX OFF MODE : TIENS JE VAIS QUAND MÊME POSER UNE QUESTION
«- ...Sur le web chacun crée son propre média et se croit journaliste. Alors question à quoi servent encore les journalistes si l’on sait tout sur tout en temps réel ?"


AXEL GANZ Patron allemand de Prisma Press :
« - Notre société vit une explosion de l’info sans filtrage [...] c’est pour cela que l’ère internet est vraiment dangereuse. Pire encore, l’information se diffuse de manière totalement anarchique...
[Cette information pas payée qui s'en va partout, ça lui brise les rouleaux au big boss de l'info.]
...et je pense qu’à long terme cela provoquera sur la jeunesse un scepticisme sur les valeurs de notre société"
[Autre pronostic du prophétique coupé au montage : A moyen terme, le format MP3 risque de causer la chute des ventes de 78 tours.]
" - Je crois donc qu’il est urgent de tirer la sonnette d’alarme, il faut que les médias traditionnels échappent à cette banalisation de l'information...
[Note interne : CNN a été crée en 1980. Internet grand public s'est développé 20 ans après]
...sinon ils vont y mourir."

Axel Ganz a tout compris, il a free dans le dos.

Pre-supposant que la presse et information vont de pair, pas à un moment n’est esquissée l'hypothèse que l’information sur internet est, peut être, parfois, sait-on jamais, de qualité. Ah non pas de ça ici !

Mais qui vois-je ? Arlette Chabot, chaleureuse patronne de l'information à France 2 :


ARLETTE CHABOT
" - Méfiez vous des adeptes des théories du complot. La vérité serait sur la toile tandis que les médias traditionnels soumis à des pressions vous cacheraient la vérité ? Alors c’est vrai, grâce à Internet aucune information ne pourra jamais plus être dissimulée ou enterrée mais, en revanche, je vous demande d’être prudent parce qu’un jour vous apprendrez que vous avez été manipulés. La traçabilité des images sur internet, origine, auteur, diffuseur, n’est pas garantie. Ayez en tête que le buzz peut être organisé par des sociétés..."

Tiens prends ça canaille d'internaute[3] au cas où t’aurais pas encore compris avec le film d’avant que ton réseau incontrôlé était le repère de tous les crétins illuminés[5] prêts à aux amalgames les plus grossiers pour démontrer ce qu'ils ont préalablement décidés. Pas comme avec les journalistes en colère.

- Des connards y en a toujours eu mais maintenant avec leur réseau,
ils ne nous regardent plus.



Et l'incorruptible journaliste d'accuser cette saloperie de web qui a poussé, un flingue sur la tempe, sa rédaction à diffuser l'année dernière de fausses images d'un bombardement à Gaza.


A propos d'internet....Interlude visuel :
Succession brutales d'images animées représentant des captures d'écran et des images du 11 septembre symbolisant le web. Le tout grossièrement filmé et monté à vive allure, en totale rupture formelle avec le reste du documentaire constitués de plans stables et d'éclairages soignées.

- Tu vois mon cono, là y a des tours qui tombent. Ça veut dire qu'on est sur internet.
- Ah d'accord... Mais pourquoi c'est filmé sur un écran de télé alors ?
- Ta gueule c'est de l'info.

La voix off, jusque là un peu réservée, se lâche enfin :

VOIX OFF MODE MENACE FANTÔME
«- Sur internet, les pires rumeurs prolifèrent comme de mauvaises herbes [...] Internet est une zone grise pour l’information »
[Non ça s’appelle un réseau ouvert et participatif. De là à tout suspecter c'est un peu comme si, au titre que mon voisin me casse les oreilles avec ses CD de Lara Fabian, j'allais demander à la police de dynamiter le quartier pour prévenir le risque de contagion.]

Edwy Plenel "ancien du monde parti à Médiapart (journal en ligne)" apporte un peu de modération au forum de la pensée unique.

- Bon mon petit Edwy, faut la jouer fine.Toute la blogosphère te regarde. Avec une émission pareille y a de quoi se faire déchirer sur internet pour 3 siècles.


EDWY PLENEL
« Quand la démocratie est jeune, elle est toujours excessive... comme toute nouveauté. [...] Nous [les journalistes] étions indispensables en terme de relais des opinions : C’est fini [...] Je crois que c’est une très bonne nouvelle car cela nous remet à notre place [...] L’opinion, le jugement, le point de vue, ce n’est pas notre monopole, ça appartient à tout le monde. Le travail sur l’information, l ‘investigation, l’enquête sur le terrain c’est notre job. Concentrons nous là dessus [...] et le reste est ouvert à la discussion »

- cool, j'ai assuré !

Le documentaire entre dans sa troisième partie synthétisée à merveille par la première phrase de Franz-Olivier Giesbert« une grande figure du journalisme français ». Phrase dont j'ai viré le gras pour en faire ressortir l'idée force :

FOG
« - Le problème avec le choc internet c’est que [...] les journaux perdent de l’argent »

Et oui, fallait y penser, le journalisme va mal parce qu'Internet pompe sa pub !

Dans le genre, comment prendre un problème à l'envers, le raisonnement de FOG est un modèle : Comme le net pique leurs lecteurs, les journaux ne vendent plus et donc ils deviennent dépendants d'autorités économiques ou de l'état. Logique.

1er rectificatif : Les annonceurs fuient les journaux parce que ces derniers ne vendent plus assez. De là à dire que la publicité va exclusivement se reporter sur internet, c'est une affirmation un poil précipitée. Mais enfin bon, au cas où, on envisage quand même une taxe Google. (Ou, comment taxer les innovations étrangères qu'on a pas eu l'ingéniosité de financer localement histoire de financer ceux qui perdent du pognon.)

2e rectificatif : C'est parce que les lecteurs ont le sentiment que les journaux, étant donné leur contenu, ne sont plus indépendants qu'ils se reportent de plus en plus sur le net et les journaux gratuits.

Encore un peu, et je vais me demander si ce documentaire n'est pas complotiste....

Dernier intervenant : Eric Fottorino, boss du Monde « un journal qui souffre financièrement mais qui reste la référence », livre sa profession de foi :

LA PROFESSION DE FOI D'ÉRIC FOTORRINO
« - Il arrive aux géants industriels de contrôler de grands médias...
[scoop]
...l’indépendance de la presse doit être économique pour être éditoriale...
[re-scoop]
...c’est la seule condition possible pour n’être ni de droite, ni de gauche...
[Le fait qu'il y ait une presse orientée politiquement n'est pas un problème, le problème c'est qu'elle le soit systématiquement du côté du pouvoir en place.]
...pour être le plus incisif possible dès lors que le travail éditorial est fiable, effectué avec honnêteté et bonne foi, avec combattivité aussi, face aux professionnels du lobbying et de la désinformation. La presse écrite doit être un contrepouvoir."

VOIX OFF MODE LAPIN CRÉTIN
" - C’est bien la prétention de tous les médias, d’être un contre pouvoir.
[euh… là aussi l'affirmation est excessive.]
...Mais plus facile à dire qu’à faire, sauf si on s’en donne les moyens, c’est ce que fait "Le Monde" depuis longtemps, non sans mal."

Et Fottorino de se vanter que jamais aucun patron ne l'a appelé pour se plaindre d'un article.

- Bon les boys : vous écrivez ce que vous voulez.
Une seule consigne : ne gêner personne.

Il confesse avoir reçu un petit coup de fil du monarque lui reprochant de ne pas avoir assez bien rapporté un voyage à l'étranger. Et bien, le prochain voyage du président, il en parlera encore dans son journal ! Non mais ! On ne la lui fait pas à Fottorino. Intouchable qu'il est.

Dans un soucis d'objectivité, après avoir passé 10 minutes à casser du net, la voix off nous précise enfin que les grandes groupes de presse français vivent désormais sous perfusion de l'état.

Et bien voila... Fallait peut-être commencer par là non ?

Pour info, le titre allemand du documentaire était :

"Les faiseurs d'opinion français font leur valise."


- M'en fous, j'ai un bail à vie.


[1] Dans le genre je conseille le nettement plus rigolo, et un minimum documenté, "2012, la conspiration de l'apocalypse"de Dimitri Grimblat.

[2] Laurent Fabius.

[3] En langage télévisuel : ces tarés qui n'ont pas la télé.

8 février 2010

vol à voile

par
Faut-il interdire ou non le voile intégral ? Voilà le genre de question de type libre-antenne conçue pour cliver.

C'est l'objet de la mission commandée au parlement par le premier ministre, qui rendait son premier rapport le 21 janvier dernier.

La vraie question devrait être : Comment en 2010, à l’époque du scannage intégral des corps dans les aéroports, de l’heil-phone à l'école, des dissections en prime-time et des faux seins en silicone comme cadeau d'anniversaire de la part des mamans botoxées à leurs filles-poupées analphabètes de 15 ans, peut-on idéologiquement et pratiquement, interdire de porter un voile ?

La réponse est simple : C’est impossible.

Interdire le voile intégral au nom de la laïcité ? Allons bon. Puisque la religion le vaut bien, réquisitionnons alors les 40.000 églises de ce pays pour y loger les millions dans la galère. Rien à voir ? Bah si un peu quand même. Tu parles d'un signe extérieur de religiosité et d'attaque républicaine tout ce foncier inoccupé !

J'entends les arguments des "contre" mais au regard du climat gouvernemental qui charpente la question, j'oppose aux abus et aux cas particuliers mon sentiment de fond, à savoir que tout fait prétexte pour culpabiliser "d'être là" une catégorie de la population française au regard de son appartenance religieuse supposée.

Rappel : On peut être d'origine arabe et athée, je suis prêt à parier qu'il y en a même infiniment plus que de femmes concernées par le voile intégral.

Au regard de l'histoire pas si lointaine, ce pointage du doigt me semble plus important à corriger que le port ou non de la pièce incriminée.

Exemple observé ce weekend dans les transports en commun parisiens : Sur deux jeunes resquilleuses l'une 100% blanche et, deux minutes plus tard, une autre d'origine maghrébine et sans voile, seule cette dernière se fait réprimander et sortir du bus.

Le voile intégral ne disparaitra pas sur un claquement de loi et rien n'en sortira si ce n'est un renforcement de l'extrémisme religieux. A moins bien sur... que ce ne soit le but. Un pays trademarké catholique (mais en perte de vitesse autant sur la foi que sur l'économie) n'aurait-il pas besoin d'un énième ennemi intérieur pour réaffirmer ses valeurs en berne ?

Allez savoir... L'humanité en a vu d'autres.

7 février 2010

2012, le sondage qui terrifie l'Elysée

par

Parce que 2012 c'est déjà aujourd'hui, apportons, nous aussi, une pierre à l'édifice sondagier...

En collaboration avec l’épicerie bio « à la bonne tige » » / Le Décalkon de Villacoublay / les passants de la station Lamarck-Caulaincourt, le vidéo-club "Hot Bunz 2000" de la Rue de la Gaité et la participation exceptionnelle d’un chauffeur de taxi roulant en Velsatis, je suis en mesure de vous livrer ce sondage exclusif nous éclairant précisément sur la direction des prochaines élections présidentielles [1] :


Au deuxième tour de 2012…

- Si Dominique Strauss Khan se présente face au Nicolas Sark_zy, le chef du FMI l'emporte avec 52% des voix (et un arrière-goût populaire de "la vache, on s’est encore fait niquer !".)

- Si Nicolas Sark_zy se retrouve face à François Bayrou, ce dernier remporte le duel à hauteur de 54% (avec un taux d'abstention record de 67%)

- Si Nicolas Sark_zy s'oppose à Vincent Peillon, celui-ci gagne sur le fil à 51,4%. (pic à 57% si Arlette Chabot promet de ne pas animer la soirée.)

Par un paradoxe algorithmique inexplicable, si Nicolas Sark_zy se présente face à lui-même, il perd encore avec 49% des voix. Quel guignon pour l'ex-winner !

Heureusement sur le débat d'idées, la tendance semble s'inverser :

- Si Nicolas Sark_zy s'oppose aux paradis fiscaux, il gagne (mais de justesse).

- Si Nicolas Sark_zy se déclare contre la neige en mai : franche victoire de 81%


Dans l'opposition tout est encore possible...

- Si Dominique De Villepin se retrouve face à Martine Aubry. Elle gagne à 51%.

- Si Martine Aubry s'oppose à Mickaël Vendetta, celui-ci l'emporte d'une courte tête.

- Si Martine Aubry s'oppose avec conviction à la politique néolibérale visant l'intérêt exclusif d'une poignée de rapaces et se prononce pour une répartition équitable des richesses et du travail, elle gagne à 54,4%

- Le match Général De Gaulle / Mickaël Vendetta est, lui, sans appel. Vendetta est éliminé par au troisième tour de SMS et De Gaulle devient chef de la tribu.


D'un autre côté...

- Opposé à Nicolas Sark_zy, le beau gosse de La Ferme célébrités en Afrique profite de son effet jeunesse pour voir sa côte remonter à 54% et ce malgré la similitude des programmes des deux candidats.


Les choses se troublent dans le cadre d’un duel Dominique De Villepin / Nicolas Sark_zy, tout se jouant sur la configuration et les options :

- Si Nicolas Sark_zy offre à chaque électeur un ticket d’euro million avec la promesse de gagner plus, il peut espérer refaire le score de 2007 (sous condition d'une campagne préalable JT de 20 heures, spécial Al-Qaida et les ultra-gauchistes sans papiers qui incendient les pavillons de seniors pour leur voler leur Minitel et autres Zone interdite à la vermine assistée qui refuse d'aller bosser au Québec.)

- Si Dominique De Villepin le prend au bras de fer chez Drucker la veille du scrutin en chantant du Susan Boyle avec trois lap-danseuses topless dans un décor imitation bordel thaïlandais, l'ancien premier ministre reprend un net avantage.

- Avantage annulé si Nicolas Sark_zy distribue des bons d'achat à moitié prix pour la nouvelle Wii, convertibles chez Darty une fois la reconduction de son mandat validée.

Étonnant : Dans le cas d’un match Nicolas Sark_zy / Jean Sark_zy (même avec lipdub), les électeurs choisissent Jacques Chirac.

Mais ce n'est rien face à la correction que prendrait le président face à Chuck Norris : Power tatanage du pif, les deux tibias pétés nets et un encastrement façon compression de Cesar dans un radar automatique sur la RN7.


Attention, une
candidature féminine pourrait brouiller la donne :

C'est LA révélation du sondage :

- Si Megan Fox se présente (dans tous les cas de figure, même sous étiquette Chasse pêche Nature et Tradition) elle remporte la présidence (y compris face à un duo DSK /Kelly Bolchenko) ! Et notre panel est formel : qu'elle porte un voile ou non n'aura que peu d'influence sur son choix final.

Il jugera d'abord sur le contenu du programme.



[1] marge d'erreur + ou - 27%.

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